Boni Yayi : entre espoirs et inquiétudes
Boni Yayi: entre espoirs et inquiétudes
Cela fait à peine deux mois qu’il est à la tête du pays, mais le président Boni Yayi montre un style de management qui, sans être inédit, semble rassurant quant à ses ambitions pour la cité. Mais si les espoirs que suscite son leadership sont grands au sein des populations, autant les craintes de désillusions amères sont évidentes, notamment chez les gens d’un certain âge. Immense apparaît alors le devoir du chef de l’Etat de ne pas décevoir les nombreux espoirs placés en lui, et de démontrer aux sceptiques qu’ils n’ont aucune raison de douter.
Deux mois seulement qu’il vient de passer au gouvernail de la République, et déjà que de chantiers ouverts ! On dirait plutôt, que d’initiatives prises, mais ce ne sont pas moins des chantiers. D’abord, le grandissime chantier que représente le challenge de la relance de la filière coton, afin de porter la production nationale à au moins 500.000 tonnes pour la présente campagne, selon le vœu du chef de l’Etat, pour permettre à notre pays de retrouver sa place parmi les grands producteurs du continent. Pour cela, le long périple initié et effectué à l’intérieur du pays pour aller rencontrer les producteurs et prendre le pari avec eux, qu’avec de meilleures conditions d’organisation et de déroulement des campagnes, ce vœu peut être réalisé.
Ensuite, en oubliant les nombreuses descentes sur le terrain, dont la visite au Port autonome de Cotonou où les responsables actuels font certes de gros efforts, mais où l’on peut encore plus, on retiendra la rencontre avec les cadres du secteur agricole et rural, aux fins de les amener à participer activement à l’amorce d’une révolution verte dans notre pays, pour en faire, dans les prochaines années et selon la volonté du président Boni Yayi, une puissance agricole. On retiendra aussi la descente à Cotonou où commence en réalité le Bénin profond, celui de la misère chronique et des difficultés de toutes sortes, pour mieux s’imprégner des conditions de vie des populations et, espère-t-on, y apporter des solutions adéquates.
En outre, les échanges avec les responsables des régies financières et autres cadres de structures visitées, pour partager avec eux sa vision du développement du pays et les amener à y adhérer, ont fini de convaincre nombre de nos compatriotes que la volonté existe au niveau du président de la république et que l’espoir est permis, à condition de se mettre à la tâche sans désemparer. Espoir, avons-nous dit ? N’est-ce pas, entre autres, sur ce thème que Boni Yayi a conduit sa campagne électorale ?
Si certains estiment par exemple qu’en invitant les cadres du secteur agricole à lui définir une politique dans le domaine qui est le leur, cela voudrait dire que le président Boni Yayi n’avait donc aucun programme concret en la matière, d’autres par contre, appréciant l’ensemble de ses initiatives, y trouvent de sérieux motifs d’espérance.
En effet, on découvre et ce n’est pas du dithyrambe que de le reconnaître, un président entreprenant en la personne de Boni Yayi. En d’autres circonstances, on l’aurait appelé un globe trotter. Cela réjouit d’autant plus que ces dix dernières années, le peuple a été habitué à un président qui semblait coupé de lui, tant celui-ci était claquemuré dans son palais et semblait s’en remettre uniquement aux fiches tendancieuses ou objectives, au point que les plus critiques le qualifient d’amorphe, de telle sorte qu’avec les initiatives de Boni Yayi, les populations ont l’impression que le pays se remet à bouger.
Des espoirs, mais…
Et si à raison ils se remettent à espérer, un bémol est mis à leur hardiesse par ceux qui disent en avoir vu d’autres, et donc, en attendant des résultats palpables, ne veulent pas donner le bon Dieu sans confession au nouveau président. C’est le cas par exemple des personnes d’un certain âge, qui affirment avoir nourri les mêmes espoirs au début de la période dite révolutionnaire, conduite alors par le commandant Mathieu Kérékou. Ces personnes expliquent que la même détermination, la même fougue avaient caractérisé l’homme du 26 octobre 1972, qui donnait alors l’impression de vouloir tout suivre par lui-même, de vouloir être partout à la fois, et dont les descentes inopinées étaient appréciées ou craintes. Mais pour ces personnes ayant vécu l’époque, c’est en désillusions et en déceptions que tout cela s’est achevé. Aussi, s’interdisent-elles de se laisser émouvoir, pour l’instant, par la conduite du chef de l’Etat et recommandent même si elles veulent bien lui faire confiance, lassés par tant d’infortunes de la part des dirigeants successifs qu’a connus le pays, à ceux qui n’ont pas vraiment vécu leur époque, d’être réservés et méfiants, afin que leur déception, si elle advenait, soit contenue.
A ces critiques qui ne manquent certainement pas de pertinence, il faut ajouter celles de certains responsables du Parti communiste du Bénin, pour qui la démarche du président Boni Yayi n’a rien d’inédite et n’équivaut nullement au changement prôné. Pour eux, seule la mise en œuvre diligente du programme d’urgence élaboré par ce parti offre un gage certain de changement. Aussi, attendent-ils de Boni Yayi, qu’il fasse sien ledit programme.
On peut le remarquer aisément, si elles ne sont pas décriées par le peuple, les démarches du chef de l’Etat ne font pas non plus l’unanimité. Cela se comprend parfaitement dans un système démocratique. Mais, au-delà, le président de la République doit se sentir interpellé par les réserves des uns et des autres pour n’y voir que leurs profondes aspirations à du concret, à un mieux être individuel et collectif, pour mieux prendre la mesure de sa responsabilité vis-à-vis d’eux, et ne pas les décevoir.
Par Willéandre HOUNGBEDJI
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